Dans un ancien stade de basket, surchauffé par 5 000 fidèles galvanisés, le père Pedro interrompt son homélie de deux heures trente pour interpeller avec humour le journaliste de Libé. «Frère Laurent, que vas-tu écrire sur nous ? La Croix, j’aurais compris, mais Libération !» Rires, même si les fidèles venus assister à la messe comme tous les dimanches matin, sur la colline de Manantenasoa à dix kilomètres de la capitale Antananarivo, parlent le malgache, très peu le français.
Le prêtre de 73 ans, lui, disserte en quatre langues, dont l’espagnol et… le slovène. C’est d’ailleurs le Premier ministre de la Slovénie qui l’a proposé l’an dernier au prix Nobel de la paix, soutenu par des parlementaires français. Explication : Pedro Pablo Opeka, né le 29 juin 1948 dans la banlieue de Buenos Aires, a des parents slovènes, réfugiés après la Seconde Guerre mondiale en Argentine. Son père, «à la foi de charbonnier», avait pris les armes contre les soldats communistes. Lorsque Tito l’emporta et fonda la Yougoslavie, le catholique s’enfuit en Autriche, occupée par les Anglais. Ces derniers, qui suspectaient les réfugiés de collaboration avec les fascistes italiens, le renvoient dans son pays. Arrêté, le Slovène est conduit, raconte aujourd’hui son fils, «au fond d’un cratère d’obus pour y être fusillé». «Unique rescapé d’un charnier de 5 000 personnes», (un miracle ?) il se réfugie cette fois en Italie. Là, dans un camp de la Croix-Rouge, il rencontre Ma